
Projet photovoltaïque flottant sur le lac du Dagour :
Une initiative contestée pour ses impacts environnementaux et sociaux
Contexte général
EDF Renouvelables porte un projet de centrale photovoltaïque flottante sur le lac du Dagour, situé à cheval sur les communes de Bourg-Saint-Bernard et Lanta, en Haute-Garonne. Ce projet prévoit l’installation de panneaux solaires sur 7,2 hectares du plan d’eau, représentant entre 27 % et 42 % de sa surface selon le niveau d’eau, pour une puissance installée de 8,19 MWc et une production annuelle estimée à 10,5 GWh.
Il s’agirait de la première retenue sur cours d’eau en France à faire l’objet d’un tel aménagement industriel. Ce choix suscite de fortes inquiétudes au sein de la population locale et des associations environnementales, tant pour ses impacts sur l’écosystème que pour l’absence de réelle concertation.
Avis critique de l’Autorité Environnementale
Dans un avis rendu le 15 mai 2025, la Mission Régionale d’Autorité Environnementale (MRAe Occitanie) a souligné de nombreuses lacunes dans le dossier présenté. Parmi les principaux points de vigilance :
Changement climatique : les impacts sur la ressource en eau et l’irrigation sont sous-estimés. Aucune modélisation n’a été réalisée pour les scénarios de sécheresse ou de crue.
Risque d’inondation : aucune étude hydraulique n’a été menée, alors que des phénomènes d’embâcles ou d’arrachement des structures flottantes sont possibles.
Qualité de l’eau : le suivi de la qualité chimique et thermique n’est pas prévu, et l’entretien des panneaux est mal défini.
Biodiversité : les effets sur les oiseaux aquatiques, les chauves-souris et les zones humides sont insuffisamment pris en compte.
Choix du site : le lac du Dagour n’est pas un milieu dégradé et aucune étude sérieuse d’alternatives à moindre impact n’a été proposée.
Position de l’association Les Lacs du Lauragais
Notre association tient à alerter les habitants et les institutions sur les risques que ce projet fait peser à court, moyen et long terme sur :
La biodiversité locale, aujourd’hui insuffisamment prise en compte.
La qualité de l’eau et l’équilibre thermique du lac.
Le patrimoine naturel et touristique du site, mentionné dans de nombreux guides de Haute-Garonne.
Le lien social construit autour des usages partagés du lac : pêche, promenade, détente, sensibilisation à la nature.
Ce projet, s’il voit le jour, privera la population de l’accès libre à cet espace pendant plusieurs décennies. Il fige également toute perspective d’aménagement respectueux du site à vocation environnementale, éducative ou touristique.
Analyse des arguments avancés par l’AFR
Qu’est-ce qu’une AFR (Association Foncière et de Remembrement) ?
un établissement public caractère administratif. Il relève donc du droit public et de la juridiction administrative.
L’Association Foncière des Agriculteurs-Irrigants (AFR), favorable au projet, a récemment diffusé plusieurs éléments de langage dans une campagne locale. L’association Les Lacs du Lauragais souhaite apporter ici une réponse factuelle et argumentée.
➤ Coût d’entretien de la retenue (120 000 €/an)
Réponse : Ce besoin de financement ne saurait justifier un projet industriel aux effets irréversibles. Des solutions de cofinancement public ou coopératif existent, sans artificialisation du lac.
➤ Modernisation des équipements de pompage
Réponse : Ces investissements relèvent de la gestion courante d’un ouvrage collectif. Ils ne doivent pas être conditionnés à un projet impactant l’environnement.
➤ Limitation supposée de l’évaporation
Réponse : Cet effet est hypothétique, non mesuré localement, et largement compensé par les risques accrus sur l’oxygénation et l’équilibre thermique de l’eau.
➤ Concertation avec les habitants
Réponse : La concertation a été très partielle et insuffisante. Une seule réunion publique a été organisée, fortement cadrée par EDF Renouvelables, avec des éléments d’information sommaires et des études d’impact incomplètes, qui ne reflètent pas l’envergure réelle du projet — à savoir la première industrialisation d’une retenue sur cours d’eau en France. De nombreux riverains se disent peu ou mal informés, et regrettent l’absence de débat public contradictoire et transparent.
➤ Soutien à l’agriculture locale
Réponse : Le maintien d’un outil d’irrigation est possible sans artificialiser le plan d’eau. Il faut dépasser les logiques d’opposition entre environnement et agriculture pour construire des solutions durables.
➤ Production d’énergie verte locale
Réponse : Le développement des énergies renouvelables est nécessaire, mais doit prioritairement se faire sur les toitures, friches industrielles ou parkings, et non au détriment de milieux aquatiques naturels.
Un mouvement régional structuré
En mars 2025, la Ligue de Protection des Lacs d’Occitanie a vu le jour. Elle regroupe trois collectifs citoyens engagés contre des projets similaires :
- Mondelybre (lac de Mondely, Ariège)
- Les Lacs du TarnSud (lac de Messal, Tarn)
- Les Lacs du Lauragais (lac du Dagour, Haute-Garonne)
Cette coordination entend porter une voix commune auprès des pouvoirs publics pour demander un moratoire sur tous les projets photovoltaïques flottants sur les plans d’eau naturels, tant que les garanties environnementales ne sont pas réunies.
Nos demandes
L’association Les Lacs du Lauragais demande officiellement :
- La suspension immédiate du projet en l’état.
- La réalisation d’une étude d’impact complète, incluant une recherche sérieuse d’alternatives.
- L’organisation d’une concertation ouverte, transparente et inclusive, avec les habitants, les usagers du territoire et les associations locales.
Conclusion
La transition énergétique est indispensable. Mais elle ne peut se faire au détriment des écosystèmes, de la qualité de vie des habitants et des ressources naturelles qui fondent la résilience de nos territoires.
Ce lac n’a pas de voix. Donnez-lui la vôtre.